
Résumé
Si la Critique de la raison pure est le livre séminal de la philosophie classique allemande, la Métacritique que publie en 1799 son élève Herder, ami de Goethe et pasteur à Weimar, représente la polémique la plus acerbe conduite par un contemporain contre l’œuvre du maître. Cet ouvrage, qui s’inspire à la fois de Leibniz et de philosophes britanniques, annonce certains aspects de la pensée de Hegel et vise avant tout à démontrer que les concepts ne se construisent jamais a priori mais résultent d’une interaction entre le sujet et les objets du monde. Herder, qui avait inspiré plusieurs mouvements littéraires allemands, du Sturm und Drang aux œuvres de Jean Paul Richter, continue à situer son raisonnement entièrement du côté de la sensibilité. L’école critique ignore en outre, à ses yeux, l’importance du langage. Celui-ci n’est pas défini comme un outil de la pensée mais comme la pensée elle-même, née d’une interaction avec le monde, inscrite dans la profondeur des mots dont il explore volontiers l’étymologie. Singulièrement négligée en France, la Métacritique de Herder esquisse une alternative au kantisme qui conduira à divers avatars de l’anthropologie et de la philosophie du langage en Allemagne.
Caractéristiques
Sommaire
Entendement et Expérience
Une métacritique de la critique de la raison pure
PREMIERE PARTIE
1. – Titre et introduction
« Critique de la raison pure », un titre surprenant
Comment il en résulte une métacritique
Conditions nécessaires
Leibniz et Locke sur le lien entre raison et langue
Aristote, Platon, les stoïciens et Scaliger sur la même question
« Introduction ». La différence entre connaissance pure et empirique
Passage de Leibniz sur le sujet
Existe-t‑il une connaissance indépendante de toutes les impressions sensibles ?
« Sur la différence entre les jugements synthétiques et analytiques » Passage prétendument classique de la philosophie critique sur le sujet
Essai de s’orienter
1. – Qu’est-ce que la connaissance a priori ?
2. – Que signifie synthèse ou synthétique ?
3. – Existe-t‑il dans toutes les sciences théoriques de la raison des propositions dans lesquelles le prédicat dit davantage que le sujet ?
4. – Existe-t‑il des jugements synthétiques a priori et le but de la métaphysique est-il d’élargir notre connaissance au-delà de l’expérience grâce à de tels jugements ?
5. – La métaphysique peut-elle être guérie, corrigée poursuivie grâce à une philosophie transcendantale ?
Pensées de Bacon
2. – Métacritique de la prétendue esthétique transcendantale
Sur l’intuition, l’intuition empirique, la forme des phénomènes, la pure forme a priori, l’esthétique transcendantale
Sur l’espace et le temps comme intuitions a priori
Discussion du terme « espace »
Sa double signification
Métacritique des affirmations critiques sur le concept d’espace
Genèse du concept de temps d’après les données de la langue humaine
Métacritique des affirmations critiques sur le concept de temps
Origine de ces affirmations
Construction des concepts d’espace et de temps grâce à un tiers
La vue et l’espace
L’ouïe et le temps
La vue et l’ouïe, l’espace et le temps, réunis par la force
Première catégorie de l’être, de l’existence, de la continuité de l’existence grâce à la force
Leibniz sur la philosophie en langue allemande
3. – Métacritique de ce qu’on appelle analytique transcendantale
Exposition de l’idée critique d’une « logique transcendantale »
Exposition du « fil directeur critique de tous les concepts purs de l’entendement »
Doutes à cet égard et à l’égard de la table des catégories
Catégories d’Aristote, de Leibniz et d’autres
« Déduction critique des purs concepts de l’entendement »
De l’origine et du développement des concepts humains de l’entendement
Métacritique de la « déduction transcendantale des purs concepts de l’entendement »
Du lien interne et de la mise en série de nos concepts de l’entendement
Première série des usages de l’entendement. La catégorie de l’être
Deuxième série. Catégorie des qualités
Troisième série. Catégorie des forces
Quatrième série. Catégorie de la mesure
Relation des catégories aux quatre sciences de l’entendement humain
4. – Le schématisme des purs concepts de l’entendement
Présentation et métacritique du schématisme critique
Des images intellectuelles des concepts de l’entendement
Catégorie de l’expression des concepts humains de l’entendement
Traits fondamentaux de la langue comme type d’une action cohérente de l’entendement.
5. – Métacritique du système de tous les principes de l’entendement pur
Présentation du système critique de tous les principes du pur entendement
Métacritique du tableau de ces principes
En particulier des analogies de toute expérience
Justesse des postulats transcendantaux de toute pensée empirique
Véritables principes de l’entendement humain d’après ses catégories, vus de façon subjective
Principes de l’entendement, exprimés de façon objective
6. – De l’idéalisme et du réalisme
La philosophie critique n’a ni connu ni réfuté le système de Berkeley
Sur l’idéalisme et le réalisme
Différente signification de l’être dans les catégories
I. – Connaissance de ma propre existence
II. – Connaissance des qualités et des genres des choses
III. – Connaissance du lien entre la cause et l’effet
IV. – Connaissance de la mesure des choses
La table critique des principes du pur entendement ordonnés en principes pratiques de l’entendement dans l’expérience
Classes des idéalistes selon les quatre mondes de la connaissance
Véritable présentation du système de Berkeley grâce à laquelle ce système se corrige lui-même
Illusion de l’égoïsme critique
7. – De la chose en soi à côté de et derrière tous les phénomènes
Raison de la distinction de tous les objets en phénomènes et noumènes. Métacritique de la distinction
Origine de la méprise aventureuse consistant à considérer le noumène hors du phénomène comme une chose en soi
Annexe. – « Sur l’amphibolie des concepts de la réflexion à travers la confusion d’un usage empirique de l’entendement avec son usage transcendantal »
Qu’est-ce que la réflexion ?
Topique critique des concepts de la réflexion
Métacritique de cette constellation utopique
Principes du lien de tous les concepts de relations dans l’esprit humain
Existe-t‑il une frontière entre les concepts de l’imagination et de l’entendement ?
Topique des domaines de la sensibilité, de l’imagination et de l’entendement
Sauvetage de Leibniz contre les accusations de la philosophie critique
Contenu de la philosophie critique selon la table de catégories du néant
Raison et langage
Une métacritique de la critique de la raison pure
DEUXIEME PARTIE
8. – Métacritique de la dialectique transcendantale
Introduction, de l’apparence transcendantale
Qu’est-ce que la raison ?
« Le premier livre de la dialectique transcendantale, des idées transcendantales »
« Système des idées transcendantales »
De l’origine, du but et de l’usage des concepts universaux dans l’âme humaine
9. – Des paralogismes de la raison pure
Ceux-ci lui sont-ils essentiels ?
Jugement de la raison sur le « Je pense » et les conclusions à en tirer sur l’immortalité
10. – Des antinomies de la raison
« Organisation antinomique de la raison »
Jugement de la raison sur ces antinomies
« Premier conflit des idées transcendantales sur la finitude ou l’infinité du monde »
Deuxième conflit. Sur le simple et le composé dans les choses
Troisième conflit. De la causalité et de la liberté
Quatrième conflit. Sur un être absolument nécessaire dans le monde
11. – L’idéal de la raison
« Représentation critique du prototype transcendantal »
« Erreurs de compréhension à son sujet »
Véritable concept de l’idée la plus pure de la raison humaine
Une telle idée existe-t‑elle ?
Peut-on ou doit-on la voir comme une imagination ?
12. – L’usage régulateur de la raison
« Représentation critique de la raison » envisagée d’un point de vue métacritique
Schéma de l’unité de l’entendement et de la raison
Loi de la raison
13. – Discipliner la raison pure
« Représentation de la discipline critique » avec un accompagnement métacritique
Existe-t‑il une discipline de la raison pure ? Quelle est-elle ? Et d’où vient-elle ?
Discipliner par la plaisanterie et la moquerie
Swift sur l’origine des nouveaux schématismes dans la philosophie et sur leur vaste diffusion
14. – Du canon de la raison
« La discipline de la raison pure du point de vue de son usage polémique »
La raison pure décanonisée
1. – Le tenir pour vrai
2. – La conviction
3. – la persuasion
4. – La vérité
5. – L’opinion
6. – La croyance
7. – Le savoir
8. – L’autorisation d’avoir une opinion
9. – La croyance pragmatique
10. – La croyance doctrinale
11. – La croyance morale
Futur chemin de la métacritique
Quelle est la sphère des forces de la connaissance humaine, en particulier de la raison ? Comment s’oriente-t‑on en elle ?
I. – La raison considérée comme un pouvoir
Les sphères de la force humaine de connaissance
II. – La raison considérée comme source de connaissance
Périodes de la raison
III. – La raison considérée comme objet
Les genres de certitude de la connaissance humaine
15. – La critique manquée de la raison pure
I. – Le point de départ de l’œuvre. Le doute de Hume
II. – Exemple de concepts et de termes mathématiques mal employés
1. – A priori
2. – Synthèse a priori
3. – Transcendantal
4. – Intuition
5. – Postulat
6. – Universellement valable
III. – Un clivage de la nature humaine
1. – Scission des forces de la connaissance humaine
2. – Scission de la nature dans son ensemble
3. – Scission de la raison elle-même
IV. – Confusion dans le concept principal de l’ouvrage
Leibniz
À propos de l’exposé philosophique
Ajout. Dernières nouvelles concernant une faculté critique de la raison humaine
Concept critique des universités comme « institutions destinées à traiter comme dans une usine tout l’essentiel de l’érudition et les cerveaux qui s’y sont consacrés »
Catégories des doyens « ramenés du zodiaque d’un point de vue critique »
Des érudits en dehors de l’Université
Des étudiants ou des lettrés comme outils de l’État « sous le pouvoir juridique des facultés »
« D’une faculté tout à fait nécessaire qui aurait la liberté de juger tous les ordres du gouvernement »
« D’un département fondé pour contrôler les facultés supérieures »
« La faculté de philosophie ne peut pas être soumise à une interdiction par le gouvernement »
« Ce que les facultés supérieures doivent accepter de la part de la faculté de philosophie »
« Les chargés d’affaires ne doivent pas avoir l’audace de jouer les philosophes, parce qu’ils ne tiennent leur savoir que des facultés »
Protestation contre ces affirmations
Le conflit des facultés. Une allocution amicale et critique
Autour de l'auteur
Herder (1744-1803), théologien et philosophe, inspirateur du Sturm und Drang et ami de Goethe et Schiller, a d’abord été l’élève de Kant à Königsberg, avant de devenir son principal détracteur. Sur intendant du consistoire évangélique, il est l’une des personnalités centrales du milieu littéraire de Weimar à l’époque classique.
Introduction, traduction et notes de Michel Espagne.