Résumé
Depuis les années 1960, les problèmes d’organisation, de contrôle et de financement des systèmes administratifs constituent des enjeux collectifs majeurs dans les démocraties occidentales. Ils alimentent les diagnostics de crise des bureaucraties et favorisent l’essor de réformes préconisant de nouveaux modes de fonctionnement, souvent inspirés du New Public Management. En dépit de l’importance historique de l’État, la France n’échappe pas à ces changements. L’administration est l’objet de nombreuses critiques et de réformes. Comment, pourquoi et avec quels effets les élites françaises ont-elles développé, à grand renfort de publicité, des politiques de réforme de l’État destinées à transformer les règles historiques patiemment mises en œuvre depuis le début du XIXe siècle ? Voilà la question centrale que pose cet ouvrage. Il analyse les réformes de l’administration française du début des années 1960 jusqu’à la présidence Sarkozy. Avec la perspective d’une sociologie historique de l’État, il retrace l’essor et le développement de ces réformes sous la Ve République et analyse les multiples configurations d’acteurs qui y participent : personnels politiques, hauts fonctionnaires, ministères, experts patentés, citoyens... Il donne à comprendre le tournant néo-managérial de l’administration française, ses limites et la spécificité des voies du changement dans le contexte hexagonal. Soulignant la singularité de la préoccupation des gouvernants pour l’organisation et la transparence de la machinerie administrative, l’auteur diagnostique finalement l’émergence d’une nouvelle rationalité politique marquée par l’impératif du « souci de soi de l’État ».
Caractéristiques
Sommaire
Remerciements
Liste des sigles et abréviations
Introduction
Chapitre premier. — Pour une sociologie des politiques de réforme de l'administration
Définir les politiques contemporaines de réforme de l'administration
Analyser les réformes contemporaines de l'administration : approches classiques et problèmes épistémologiques
Quatre concepts au cœur d'une démarche de recherche
Chapitre II. — Le « souci de soi de l'État » : l'idéal d'un gouvernement rationnel de l'administration (1962-1972)
La progressive mise en questions du paradigme planificateur dans les années 1960
La constitution d'une économie de l'administration au service d'une science du gouvernement de l'État
L'administration, objet de connaissances. Des savoirs de sciences sociales au cœur des réseaux réformateurs
L'inscription des savoirs dans une politique publique et un programme politique : rationalisation des choix budgétaires et « nouvelle société »
La résorption administrative, politique et professionnelle de la RCB
Chapitre III. — Le réformisme des contre-pouvoirs : l'administration au jeu de la politique (1972-1981)
La construction de l'administration en « problème public » : publicisation, socialisation, politisation
La viabilité politique de la défense des administrés face à la bureaucratie
Les traductions législatives du réformisme des contre-pouvoirs : donner des droits aux administrés
Le développement sous contraintes du management public dans les années 1970
Chapitre IV. — Que faire de l'État ? Les contradictions d'une conjoncture critique (1981-1984)
Des dynamiques contradictoires sur l'administration : décentralisation versus réaffirmation du statut
Le tournant néo-libéral discret de l'intervention budgétaire sur l'administration
La forme résiduelle et symbolique de la « réforme administrative »
Chapitre V. — Le compromis modernisateur (1984-1991)
Effet d'indétermination et ouverture d'un espace de problématisation de l'efficacité administrative
Les fabriques d'un répertoire managérial modernisateur : un champ d'expertises au chevet de l'administration
La « mise en sens » des expertises : les modernisateurs de l'Association Services Publics
Appropriations politiques et consolidation institutionnelle du répertoire managérial modernisateur
Chapitre VI. — La genèse de « l'État stratège » ou l'influence croissante du New Public Management dans la réforme de l'État (1991-1997)
Trois processus d'accroissement des interdépendances de l'État
La concurrence entre ministères transversaux pour l'imposition de nouvelles règles de réorganisation de l'État
La fabrication d'un « modèle managérial d'organisation » : la main visible des hauts fonctionnaires
Une politique de réforme de l'État : la tentation de l'architecte et les dilemmes de l'action collective
Chapitre VII. — Retour sur la trajectoire française (1962-2008) : changer les règles historiques de l'administration bureaucratique ?
Tracer et expliquer la trajectoire des politiques de réforme de l'administration sous la Ve République
Perspectives sur les chantiers en cours de la réforme de l'État (1998-2007) : changer les règles historiques du système administratif français ?
Le tournant Sarkozy : l'appropriation politique du tournant néo-managérial ?
Conclusion. — Le « souci de soi de l'État », nouvelle rationalité politique ?
Annexe. — Présentation de la démarche d'enquête et des matériaux
Bibliographie
Index des principaux noms
Index thématique
Autour de l'auteur
Philippe Bezes est chercheur au CNRS en science politique et membre du laboratoire CERSA (Centre d’études et de recherches de science administrative, Université Paris 2). Spécialiste des politiques de réforme de l’État, il enseigne à Sciences Po en sociologie de l’administration et en analyse des politiques publiques.