Résumé
Un spectre hante l’Université française : celui de la déconstruction. Créé par Jacques Derrida à la fin des années 1960, ce concept est devenu, dans l’esprit des réactionnaires de tout poil, le mot-valise désignant tout ce qu’ils haïssent dans la pensée, lorsque celle-ci cherche à émanciper davantage qu’à ordonner. Dégénérescence de la culture, mépris pour les grandes œuvres, délire interprétatif, amphigouri linguistique, danger politique, confusion sexuelle, licence morale : à en croire les ennemis de la déconstruction, tout ce qui va mal dans le monde lui est imputable.
Que signifie la fixation frénétique d’une frange d’intellectuels sur tout ce qui peut ressembler à une pensée différente, inventive et fondamentalement démocratique ? Que cela signifie-t-il, si ce n’est la volonté de policer la pensée et ses institutions, pour mieux, ensuite, policer les corps ? Telle est l’interrogation qui a présidé au colloque « Qui a peur de la déconstruction ? », qui s’est tenu à l’École normale supérieure et à la Sorbonne en janvier 2023. En voici les actes.
Caractéristiques
Sommaire
Par ordre alphabétique :
Isabelle Alfandary, Anne Emmanuelle Berger, Jacob Rogozinski, Introduction
Étienne Balibar, Un messianique sans messianisme est-il pensable ?
Aurélien Barrau, Trahir par amour
Fabrice Bourlez, Les queer et le tact de la déconstruction
Danielle Cohen-Levinas, Plus d’une langue
Marc Crépon, L'inconditionnelle condition de la paix
Monique David-Ménard, Critique, déconstruction et affirmation de la pensée
Marc Goldschmidt, Réitération de la dernière modernité dans la déconstruction : Derrida, Benjamin et Freud
Stéphane Habib, L'usure des mots
Marta Hernandez, Expliquer n'est pas (du tout) justifier
Denis Kambouchner, Pourquoi lire Derrida
Seloua Luste Boulbina, Les souterrains de la déconstruction
Hélène Merlin-Kajman, Avoir ou ne pas avoir peur : telle est la question
Ginette Michaud, Du virus et de ses variants (retours sur le ressentiment, le racisme et le « wokisme »)
Avital Ronell, Fight Cage
Marta Segarra (CNRS-LEGS), Déconstruction des barrières entre les genres et les espèces : Hélène Cixous
Sam Weber, Dé-limitation: sur la vigilance déconstructive
Raphael Zagury-Orly, Le judéo-franco-maghrébin - “Une loi un peu folle”
Autour de l'auteur
Cet ouvrage a été dirigé par Isabelle Alfandary, Anne Emmanuelle Berger et Jacob Rogozinski.
Isabelle Alfandary est professeure de littérature américaine à l’université Sorbonne-Nouvelle. Son dernier livre : Science et fiction chez Freud. Quelle épistémologie pour la psychanalyse ? (Les Éditions d'Ithaque, 2021).
Anne Emmanuelle Berger est professeure émérite de littérature française et d’études de genre à l’université Paris 8 et professeure invitée à Northwestern et Buffalo (USA). Son dernier livre, Le Grand Théâtre du Genre (Belin, 2013), a été traduit en plusieurs langues.
Jacob Rogozinski est professeur émérite à la Faculté de philosophie de Strasbourg. Auteur de plusieurs livres sur Artaud, Derrida, la chasse aux sorcières, il a publié en 2022 Moïse l'insurgé aux Éditions du Cerf.
Y ont contribué Étienne Balibar, Aurélien Barrau, Seloua Luste Boulbina, Fabrice Bourlez, Danielle Cohen-Levinas, Marc Crépon, Monique David-Ménard, Marc Goldschmidt, Marta Hernandez Alonso, Denis Kambouchner, Ginette Michaud, Avital Ronell, Marta Segarra, Samuel