Résumé
Exilé par l’empereur Auguste au bord de la mer Noire, le poète latin Ovide (qui vécut de - 43 à18 ap. J.-C.) se trouva précipité dans une expérience existentielle à laquelle rien ne l’avait préparé. Son travail nostalgique le conduisit à ressaisir les sujets littéraires qu’il avait fréquentés : sous cet éclairage rétrospectif, l’œuvre entière prend, à la relecture, une couleur plus grave, plus émotionnelle, plus religieuse. Elle révèle un artiste complexe, curieux de métaphysique, abordant constamment la question des fins dernières. Dès ses débuts, Ovide avait vu la poésie comme un contrechant orphique à la fragilité de la vie et la métamorphose comme une transgression à la mort. C’est la même quête du sens qu’il retrouvera à la fin de son existence.
Cette étude montre comment un intellectuel pétri par l’imaginaire antique fut capable, par sa sensibilité et par son drame personnel ultime, de s’ouvrir à l’ère nouvelle. Il fut soucieux de traverser le formalisme touffu des liturgies romaines pour en identifier le sens sacré. Il s’insurgea contre la restauration mythologique et religieuse voulue par Auguste. Il s’interrogea sur l’Au-delà. Il pressentit enfin que le monde raffiné qu’il avait connu basculerait. Ainsi, isoler et analyser le motif de la mort chez l’auteur des Métamorphoses, c’est tenter de cerner la mentalité des élites romaines de son temps, à la fois éclairées et superstitieuses, indécises face au destin de Rome et perplexes devant l’accélération de l’Histoire.
Caractéristiques
Sommaire
Avant-propos
Introduction
PREMIÈRE PARTIE. — LE « MOURIR ». Ovide et son expérience personnelle de la mort
Chapitre premier. Quelques « signes » avant l’exil
Le sérieux d’Ovide
L’amour et la mort
L’idéal ovidien
La foi ?
Le problème de la mort
Chapitre II. Partir, c’est mourir beaucoup
Une descente aux Enfers symbolique
Mors gelida, mors Getica
L’absence et l’oubli
Vivre au passé
La tentation du suicide ?
Chapitre III. De l’angoisse au langage
Une autocritique ambiguë
Dévalorisation ou angoisse ?
La stérilité
L’échec sublimé
Écrire pour ne pas mourir
Chapitre IV. Ovide et le numen d’Auguste
DEUXIÈME PARTIE. — DIRE LA MORT. Formulation ovidienne de la mort
Chapitre premier. La terminologie directe
Mors
Nex
Letum
Funus
Chapitre II. Des métaphores obsédantes…
La chute
Le refus de l’« arrêt » du destin
« Fiat lux »
Le passage et la migration
Chapitre III. … au mythe personnel
La mort est ici-bas
TROISIÈME PARTIE. — LES MORTELS. Anthropologie ovidienne d’après les Métamorphoses
Chapitre premier. La condition humaine
De la théogonie à l’histoire de l’humanité
Mort et métamorphose
L’homme piégé
Mort et liberté
La mort douce
Chapitre II. Le corps
Le corps terrestre
Le déterminisme physiologique
Le corps et son irrigation
Chapitre III. L’âme et la personne : animus
Dualité et affectivité
Une psychologie de l’instinct
De l’intention à l’adhésion
Chapitre IV. L’âme et l’esprit de vie : anima
La confuse matérialité de la vie
La « réanimation »
De la terre aux astres
QUATRIÈME PARTIE. — LES MORTS ET NOUS. Une approche du spiritualisme ovidien
Chapitre premier. Visible et invisible
Tout vit, tout est plein d’âmes
Un univers de signes
Correspondances et compensations
Les échanges entre la vie et la mort
Mi-ange, mi-bête
Chapitre II. L’Au-delà
Les ombres
La mémoire d’outre-tombe
La mort verticale
Chutes et stagnation
L’agonie
Chapitre III. Les rites et la croyance
Tensions et crainte
Des deuils et des obsèques ambigus
Du formalisme au culte de la continuité
C’est la mort qui féconde
L’être et le temps
Conclusion
Bibliographie
Index nominum (hommes et mythologie)
Autour de l'auteur
Xavier Darcos, ministre du Travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville, membre de l’Institut (Académie des sciences morales et politiques), a été doyen de l’Inspection générale de l’Éducation nationale et professeur associé à l’Université de Paris IV-Sorbonne. Il a également été maire, sénateur, ministre délégué à l’Enseignement scolaire puis à la Coopération, ambassadeur de France auprès de l’OCDE, et ministre de l’Éducation nationale. Il est l’auteur de nombreuses études littéraires (notamment sur Mérimée et sur Tacite) ainsi que d’essais historiques sur l’École et sur la laïcité.