Résumé
Fondée sous les auspices du père de notre modernité philosophique Descartes, puis consolidée par des penseurs aussi importants que Leibniz, Bolzano ou Husserl, la mathesis universalis paraît représenter à elle seule l’ambitieux programme du « rationalisme classique ». Des philosophes tels que Husserl, Russell, Heidegger ou Cassirer ont pu s’accorder en ce point. Le développement de la « science moderne » aurait porté ce grand « rêve dogmatique » pour mener vers son terme le destin de la métaphysique occidentale.
Pourtant les recherches historiques récentes ont montré que l’idée de « mathématique universelle » existait bien avant Descartes, que ce dernier ne revendiquait d’ailleurs aucune rupture sur ce point et que sa réflexion se situait même assez clairement dans l’héritage des Anciens. Comment dès lors justifier que les Anciens, avec lesquels le programme des Classiques était censé rompre, aient pu déjà se préoccuper de « mathématique universelle » ?
Plus simplement encore, de quoi se préoccupaient donc ces philosophes sous ce concept ? Le regain d’intérêt pour la mathesis universalis à la fin du XIXe siècle n’avait-il pas conduit paradoxalement à la perte de son sens comme problème ? Cette étude a pour but de suivre ces questions jusqu’à leur origine et de montrer leur importance dans le dialogue entre mathématique et philosophie.
Caractéristiques
Sommaire
Introduction
La constitution de la « mathématique universelle » comme problème philosophique
I. — Aristote
L'étrange apparition de la mathématique universelle
Stratégies d'identification
La mathématique universelle comme problème
II. — « Mathématique universelle » et théories mathématiques : Aristote, Euclide, Epinomis
Théorie des proportions et mathématique universelle : la confrontation avec le dispositif euclidien
La théorie ancienne
III. — Le moment néo-platonicien
Introduction : d'Aristote à Proclus
L'étrange apparition de la mathématique générale
Le rapport aux théories mathématiques
Le caractère médiateur de la mathématique générale
La théorie de la connaissance : le rôle de l'imagination
Logique de l'imagination et logique des problèmes
Vers la science de l'ordre et de la mesure
Introduction
IV. — La renaissance de la « mathématique universelle »
La circulation du problème
Les illusions de l'histoire monumentale
Avant la redécouverte de Proclus
Les particularités du développement renaissant
Le rapport aux mathématiques
Jusqu'à Descartes
V. — La mathesis universalis cartésienne
Introduction
La mathesis universalis pour elle-même
Retour sur l'étrange apparition de la mathesis universalis
Mathesis et méthode
Le dispositif
Les raisons d'un abandon
Conclusion
Annexes I. — La quaestio de scientia mathematica communi
Annexes II. — Essai bibliographique sur la mathesis universalis chez Descartes et Leibniz
Bibliographie
Index nominum
Autour de l'auteur
David Rabouin est chargé de recherches au CNRS et enseigne la philosophie à l'ENS (Centre international d'étude de la philosophie française contemporaine). Il est également le co-auteur de Matrix, machine philosophique (Ellipses, 2003) et codirigera prochainement la collection « Métaphysiques » aux Puf.