Résumé
Entre la volonté de réflexion sur l’érudition et l’abandon dont elle est l’objet dans la conscience historique de l’autre, il y a un mystérieux décalage. Il ne tient pas à la rupture révolutionnaire puisque le fil de l’érudition, par le Comité des travaux historiques, traverse l’abîme qui a séparé l’Ancien Régime de la France contemporaine. L’ostracisme auquel ont été condamnées les études historiques savantes relèverait plutôt d’une amnésie, d’un refoulement, d’une résistance, de quelque chose comme une défaite de l’érudition dans la conscience historique française, défaite qui reste à cerner et à comprendre.
Pour en finir avec l’injustice dont l’érudition est la victime, il faudrait peut-être repérer les moments où s’est décidée la partition des différents types d’histoire, où l’histoire érudite et l’histoire littéraire se sont déchirées. Il faudrait observer quand et comment, descendue de son éminence, l’érudition a été vouée à l’auxiliariat. Mais auparavant, pour abolir le décalage qui déséquilibre les plans de la conscience historique et remettre l’érudition à niveau avec l’ensemble de l’histoire, il serait utile d’étudier sa contribution. Ce sont ces deux questions de la naissance et de la défaite de l’érudition classique française que nous nous proposons de traiter.
Caractéristiques
Autour de l'auteur
Blandine Kriegel, philosophe, professeur émérite des universités, a joué un rôle pionnier dans le redéploiement de la philosophie politique en remettant au jour la notion d’État de droit qui lui a valu un succès international. Son œuvre explore la philosophie et l’histoire politique à travers l’évolution de l’État et les concepts du droit politique de la république antique et moderne. Elle est en partie traduite (anglais, chinois, etc.) et plus discutée aujourd’hui à l’étranger, notamment aux États-Unis, qu’en France. Blandine Kriegel a été conseillère à la présidence de la République et présidente du Haut Conseil à l’Intégration.