Résumé
Pluralisme, recherche de la négociation, juridicisation des normes techniques, promotion de l’idée de régulation : ainsi se dessine un puissant mouvement de contractualisation du droit lié à la mondialisation, certains évoquant même une paradoxale reféodalisation du lien social. N’est-il pas, en conséquence, opportun de créer de nouvelles catégories juridiques ? La juridicisation du politique ne conduit-elle pas, risque ou chance, au gouvernement des juges ? Quelle est la signification de la procéduralisation concernant l’évolution du droit ? En quoi et à quelles conditions le droit doit-il s’y conformer ?
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On parle aujourd’hui de juridicisation et de judiciarisation. C’est-à-dire que la société et l’espace public sont saisis par le droit, irrigués par l’argumentation juridique, qui provient de sources de plus en plus diverses et nombreuses, avec des effets concrets au quotidien comme la pénalisation de la vie publique. Cela s’inscrit dans la continuité de transformations profondes et complexes qui, depuis un demi-siècle, touchent le droit, avec le recours accru à l’éthique après la prise de conscience des crimes nazis, puis autour de l’émergence de la bioéthique, du déclin du pouvoir législatif, du recours accru aux procédures de contrôles juridictionnels de constitutionnalité, par exemple. Au final, ces mutations hétérogènes aboutissent au développement de la revendication de droits créances, à la moralisation et à la constitutionnalisation du droit, et à un mouvement de contractualisation de celui-ci, lié à la mondialisation, qui conduit certains à s’interroger sur ses effets sur le lien social. A cette fin, l’auteur remarque qu’il appartient au droit d’être en transformation plus ou moins rapide et analyse au regard des trois temps fondateurs de l’ordre juridique les évolutions actuelles, selon trois questions directrices : l’évolution actuelle des droits de l’homme ne dénature-t-elle pas leur projet ? La juridicisation du politique illustrée par la constitutionnalisation du droit ne conduit-elle pas au gouvernement des juges ? En quoi et à quelles conditions le droit devrait-il se conformer à la procéduralisation qui le caractérise ?
(J. d’Harcour)
Caractéristiques
Sommaire
Introduction : Extension du domaine du droit -- L'hypothèse d'une mutation -- Les réactions aux mutations du droit
Première partie : L'État des droits de l'homme
1 -- Les droits de l'homme et les droits positifs 2 -- La dignité et son ambiguïté 3 -- Droits des personnes, droits culturels, droits des groupes
Deuxième partie : La juridicisation du politique
1 -- La constitutionnalisation du droit 2 -- Le gouvernement des juges 3 -- La justice pénale internationale, institution ou juridiction
Troisième partie : La procéduralisation du droit
1 -- Les composantes de la procéduralisation 2 -- Critique de la raison juridique procédurale : Paul Ricoeur, Bernard Bourgeois, Franck Michelman 3 -- Procéduralisation et société 4 -- Figures de la procéduralisation
Conclusion -- Bibliographie
Autour de l'auteur
Dominique TERRÉ, juriste et philosophe, est chargée de recherche au CNRS, elle a publié : Les dérives de l'argumentation scientifique (Puf, 1999)