
Résumé
Aussi paradoxal que cela puisse paraître, les prisons ont été des espaces d’autonomie, voire de liberté, pour les minorités religieuses clandestines des XVIe-XVIIIe siècles. Récusants catholiques dans l’Angleterre protestante, crypto-protestants français après la révocation de l’édit de Nantes, morisques et marranes qui pratiquaient l’islam ou le judaïsme dans l’Espagne inquisitoriale, en ont fait des lieux de résistance, de culte et de sociabilité. Ils y ont laissé des graffiti, rédigé des lettres ou des livres, propagé des rumeurs et dissimulé des objets. L’expérience de l’incarcération et la figure du détenu ont alors acquis une fonction centrale dans la construction de ces communautés, dont la résistance à la répression passait par le sentiment du sacré et l’usage du secret.
Natalia Muchnik propose à travers cette exploration vivante des prisons d’Ancien Régime, et du sort des minorités religieuses en leur sein, une étude novatrice des lieux d’enfermement.
Caractéristiques
Sommaire
Introduction
Chapitre I – Les portes ne sont jamais fermées…
Les espaces carcéraux : spécificités et diversité
La multiplicité des lieux de réclusion
Pénitence et mise à l’écart
Un isolement relatif
Chapitre II – Des hommes de toutes conditions
Les minorités recluses
Reproduction des inégalités sociales…
…ou recomposition des rôles sociaux ?
Chapitre III – Entre maintien de l’ordre et conversion…
Les geôliers, proximité et distance
Magistrats et avocats
Les convertisseurs
Chapitre IV – Les minorités enfermées
« Résister »
La langue du secret
La formation de communautés liturgiques
Chapitre V – Les prisons, lieux du sacré
Inscrire sa présence
Sacraliser l’espace
La discordance des temps
Chapitre VI – La douleur de la foi
Sublimer la souffrance
Carnets de prison
Partager
Chapitre VII – Les prisons dans la ville
Des espaces non-clos ?
Du « périmètre sensible » ou l’effacement de la frontière
La prison hors-les-murs
De la cellule à l’échaffaud
Chapitre VIII. – L’expérience carcérale dans les diasporas modernes
Les prisons, pôles du territoire communautaire
La circulation de l’information
La contagion
Le front de la « vraie » foi
Conclusion
Sources – Bibliographie – Index des noms propres – Remerciements – Table
Autour de l'auteur
Natalia Muchnik, directrice d’études à l’EHESS, a travaillé sur la diaspora séfarade et l’Inquisition, et mené une étude comparée des diasporas modernes. Elle est notamment l’auteur de De paroles et de gestes. Constructions marranes en terre d’Inquisition (Ehess, 2014) et de L’Europe des diasporas – XVIe-XVIIIe siècle (Puf, 2019).