Résumé
Les grandes écoles et leurs pratiques de sélection font l’objet d’un intérêt croissant de la part des médias et des citoyens : ces institutions sont régulièrement critiquées pour leur fermeture sociale, en même temps qu’elles fournissent à leurs élèves, transformés en « élus », un accès à des positions privilégiées. Dans ce contexte, les politiques d’ouverture sociale lancées à partir des années 2000 visent à assurer l’accueil de tous les milieux sociaux et ainsi réparer l’idée même de méritocratie scolaire.
Cette enquête au long cours menée dans trois institutions prestigieuses en France et au Royaume-Uni (Sciences-Po, l’Essec et l’université d’Oxford) offre une plongée au cœur de ces nouveaux dispositifs d’égalité des chances. Quels sont leurs effets réels sur ces établissements ? Comment les grandes écoles parviennent-elles à assurer leur rôle de sélection des élites, à l’heure où la diversité est promue au rang de valeur ? Ces programmes incarnent une nouvelle morale des concours, marquée à la fois par la mise en marché de l’éducation et l’individualisation du parcours des élèves. Leur objectif est moins d’élargir la porte que le vivier des candidats qui s’y présentent. Si les institutions d’élite renouvellent de ce fait leur propre légitimité à exercer une forme de « magie scolaire », la question des inégalités sociales demeure.
Caractéristiques
Sommaire
Introduction : Politiques de la porte
Section 1 : Le concours comme problème public
Section 2 : La diversité comme nouvelle valeur
Section 3 : Légitimer les inégalités à l’ère de la diversité et de la transparence
Section 4 : Méthodologie et présentation des données
Chapitre 1 : « Bienvenue dans notre institution d’élite ! » Le travail d’identification des publics de l’ouverture sociale
Section 1 : La bureaucratisation de l’ouverture sociale
Section 2 : La construction sociale des publics
Section 3 : Expliciter les critères de jugement
Chapitre 2 : « N’ayez pas peur ! » Bienveillance, émotions et logiques de production des loyautés bureaucratiques
Section 1 : Les émotions et le concours
Section 2 : Le travail émotionnel de gestion de la façade institutionnelle
Section 3 : S’identifier pour modifier les aspirations
Section 4 : Maintenir la loyauté
Chapitre 3 : « Soyez vous-mêmes ! ». Jurys et critères au travail
Section 1 : Les trois moments de la décision
Section 2 : La mise en récit du soi
Section 3 : Le maintien des critères scolaires
Section 4 : Qu’est-ce que le « potentiel » ?
Section 5 : Le candidat « chouchou » ? Projections et mimétisme chez les jurys
Chapitre 4 : « La revanche du premier recalé ». Gérer l’après-concours
Section 1 : A Sciences Po. Justifier de la décision
Section 2 : A l’ESSEC. Délier les loyautés
Section 3 : A Oxford. Admettre quand même
Section 4 : Convergences et divergences franco-britanniques
Conclusion : Penser le concours à l’heure de la diversité et des marchés scolaires
Remerciements
Annexes
Autour de l'auteur
Annabelle Allouch est maîtresse de conférences en sociologie à l’université de Picardie-Jules Verne (CURAPP) et chercheuse associée à l’Institut national de l’audiovisuel (INA). Elle est notamment l’auteure de La Société du concours. L’empire des classements scolaires (Seuil, « La République des idées », 2017) et de Mérite (Anamosa, 2021).