Résumé
Droits subjectifs, sujet de droit, propriété privée : la pensée critique contemporaine se méfie de ces concepts caractéristiques du libéralisme, auxquels elle oppose les exigences de la solidarité, de la communauté ou du commun. Faut-il cependant abandonner aux libéraux la défense de l’individualisme libéral au motif qu’il sert de caution au capitalisme ?
Une lecture non conventionnelle de Kant réfute le lien généralement établi entre libéralisme juridico-politique et libéralisme économique. Sa justification de la propriété privée pose en effet que tout être humain a droit à avoir une place sur terre pour vivre libre. Au siècle suivant, Marx montre que l’économie capitaliste fait au contraire du droit de propriété privé l’instrument d’une dépossession de masse, condamnant toute une part de l’humanité à l’exploitation et à l’exclusion. Ce constat, toujours pertinent, ne doit pas faire oublier les vertus critiques du concept révolutionnaire des droits. Repensés pour s’adapter aux conditions présentes, les concepts fondamentaux du libéralisme juridique font ressortir l’illégitimité des formes contemporaines de l’exclusion, qui privent dans la pratique, sinon formellement, les individus concernés du statut de sujets de droit.
Caractéristiques
Sommaire
Introduction
Une interprétation politique des droits de l’homme
De la démocratie à la propriété
Propriété et citoyenneté
Le fondement normatif des droits subjectifs :
« la force qui oblige dans tout droit » (partie I)
La propriété privée capitaliste, matrice des inégalités modernes (partie II)
Pauvres et migrants : figures de l’exclusion (partie III)
Conclusion : Le commun, la personne
Première partie : Le fondement normatif des droits subjectifs : « la force qui oblige dans tout droit… »
Chapitre I. La théorie kantienne du droit est-elle « duty-based » ?
Théories « duty based » et « right based »
Théorie des droits ou théorie des devoirs ?
Le « droit de l’humanité » (das Recht der Menschheit)
La personne
Retour à Waldron
Chapitre 2. Du droit de l’humanité au droit de propriété
Le « droit privé » kantien :
une théorie des droits subjectifs en général
Droit inné et droits acquis
La possession commune de la terre
L’universalité du droit de propriété
Deuxième partie : Propriété et droits sociaux. La propriété privée, matrice des inégalités modernes
Chapitre 3. La critique marxienne de la propriété dans Le Capital
La critique de la propriété privée dans le Manuscrit de Kreuznach et Sur la question juive
Des Manuscrits de 1844 aux Grundrisse : une conception anthropologique de la propriété
Le Capital : propriété privée et travail salarié
Les présupposés normatifs de la critique de la propriété privée dans Le Capital
La restauration de l’« union originelle »
De la dépossession à l’expulsion
Le commun de la liberté
Chapitre 4. Droits subjectifs et solidarité sociale
L’État social et le langage des droits
Les critiques des droits subjectifs à la fin du xxe et au début du xxie siècle
La prévalence du droit objectif
Les droits subjectifs : du concept à la technique administrative
Troisième partie : Figures de l’exclusion : pauvres et migrants
Chapitre 5. Droits des pauvres, droits des migrants
La pauvreté
Philosophie de la pauvreté
L’État-providence, en lieu et place du droit au travail
Fragilité normative de l’État-providence
Le retour de l’assistance ?
Le sujet passif
Chapitre 6. Du droit à l’hospitalité au devoir d’hospitalité : la démocratie à l’épreuve de l’immigration
De la souveraineté des États à la souveraineté démocratique
La démocratie : une question de droits
Du droit inné à la liberté au droit d’hospitalité
Un devoir d’hospitalité ?
Conclusion
Le commun, la personne
La personne
Citoyen actif, citoyen passif : les hésitations de Kant
Le sujet de droit aujourd’hui
La communauté, le commun
Bibliographie
Remerciements
Autour de l'auteur
Catherine Colliot-Thélène est professeur émérite de philosophie à l’université de Rennes 1. Ses travaux portent sur l’œuvre de Max Weber et la philosophie politique, de tradition allemande notamment. Elle est l’auteur de La Démocratie sans « demos » (Puf, 2011) qui a été traduit en plusieurs langues.