Résumé
L’idée de photographie a longtemps été liée à celle de reproduction de la réalité ; d’où son rapport conflictuel à l’art, mais aussi son rapport diffus à l’histoire. D’innombrables collections de « documents » ont été accumulées et diffusées sans visée précise et c’est l’œuvre du temps qui en a fait des « archives », objets d’une véritable ruée à l’ère numérique ; alors que la photographie sert l’histoire, elle instruit en parallèle la critique des histoires reçues. Le XXe siècle a entretemps découvert qu’elle avait, ou était, une histoire, et il s’est agi d’en penser la logique et les contours. Entre l’histoire de la photographie comme médium, en particulier aux États-Unis, et l’histoire ou contre-histoire par l’image, ce livre retrace la relation complexe et contradictoire de ce que Paul Valéry appelait la « notion de photographie » avec la science du passé.
Erratum. À la suite d’une erreur, les illustrations insérées en Fig. 14a et b sont identiques aux Fig. 13a et b. Les images correctes pour les Fig. 14a et b sont disponibles en téléchargement complémentaire sur cette page. Les légendes ne changent pas.
Caractéristiques
Sommaire
Introduction : La photographie pour et contre l’histoire
PREMIÈRE PARTIE : Des inventions aux inventaires
CHAPITRE I : Le miroir qui se souvient
1. L’idée de photographie et la reproduction
Premiers témoignages
L’intervention d’Arago
De la reproduction à la reproductibilité
2. L’invention anglaise et son expansion en Ecosse
L’invention anglaise, la reproduction et la mémoire
Une théorie écossaise de la photographie ?
3. Le portrait et le miroir
Un clivage plus prononcé en France qu’ailleurs
Les portraits : objets et discours de mémoire
Miroirs et mémoires
Le « miroir qui se souvient » et son retour vers 1860
Conclusion
CHAPITRE II : L’histoire par l’image : le cas des États-Unis
1. Aperçu de la période
Evolution générale
L’histoire par l’image : les amateurs européens
2. Le grand marché des images du monde : la stéréoscopie aux États-Unis
De « l’âge d’or » européen à l’émergence des vues américaines
La stéréoscopie aux États-Unis, du loisir à l’éducation
3. De l’actualité à l’histoire photographique : le commerce des images de guerre
Un pari artistico-commercial et ses avatars mémoriels
Le credo de la photo-histoire
La photographie fédérale dans l’Ouest ou la reconstruction d’une histoire nationale
4. Des institutions aux amateurs : l’histoire pour tous
Conclusion
DEUXIÈME PARTIE : La photographie comme histoire dans les années 1930
CHAPITRE III : Histoires professionnelles et histoires philosophiques
1. Le moment 1930 : entre commémoration et rénovation
Histoire « artistique » contre histoire « technique » : une opposition en trompe-l’œil
L’histoire comme commémoration : les centenaires
L’exception allemande : l’histoire à partir de la nouvelle photographie
2. Retour sur les histoires professionnelles à l’ancienne
Erich Stenger : le national-professionnalisme
Georges Potonniée et les avatars de la mémoire photographique française
3. Les histoires philosophiques : de la « notion de photographie » au travail des archives
Valéry : la photographie comme anti-histoire ?
De Benjamin à Kracauer : la photographie comme histoire et l’histoire comme photographie
Conclusion
CHAPITRE IV : Art et histoire. Les deux histoires américaines de la photographie
1. Aperçu historiographique
Newhall, l’histoire du médium et sa lignée proliférante
Taft : histoire primaire, livre sans critique
2. L’histoire sociale de Robert Taft
La scène américaine
La valeur historique
3. Archéologie d’une « histoire sociale » : opposition et collaboration
Les sources publiées
Le témoignage des archives et la correspondance Taft-Newhall
Conclusion.
TROISIÈME PARTIE : La photographie contre l’histoire ?
CHAPITRE 5 : Des anti-histoires aux contre-histoires
1. Les critiques théoriques de l’image-événement
Conventionnalisme et scepticisme
Des pseudo-événements aux événements-images
Les paradoxes de La Chambre claire
2. Après le Vietnam : micro-histoire et contre-histoire
De la guerre à On Photography de Sontag
De My Lai à Gettysburg : William Frassanito et le « corps déplacé »
Michael Lesy et le « cauchemar américain »
3. À propos de Believing is Seeing d’Errol Morris
L’effervescence anti-historique à l’ère néo-conservatrice
Errol Morris : un travail de fourmi dans un monde d’images de guerre
4. Au-delà de la critique : les nouvelles formes de la contre-histoire
La photo-littérature du trauma et la mémoire « connective »
Réappropriations et relectures : l’hyper-historicisme au risque du nihilisme iconique
ÉPILOGUE : Ruée sur les archives : la photo-histoire contre l’histoire de la photographie ?
Autour de l'auteur
Historien des images aux États-Unis, François Brunet est professeur à l’université Paris Diderot et membre de l’IUF. Il est notamment l’auteur de La Naissance de l’idée de photographie (Puf, 2000), dont cet ouvrage prolonge la réflexion. Il a également dirigé L’Amérique des images. Histoire et culture visuelles des États-Unis (Hazan/Univ. Paris Diderot, 2013).