Résumé
L'homme sait qu'il doit mourir et l'on s'accorde habituellement à voir dans ce savoir de sa propre mortalité un des caractères essentiels de l'humanité, à côté du langage, de la pensée et du rire.
Or les religions, les métaphysiques, la culture humaine tout entière se sont donné pour programme de vaincre la mort. Et la philosophie occidentale, de Platon à Hegel, a à son tour affirmé que c'est dans l'exercice même de la pensée que la mort et la finitude se voient surmontées.
On se propose ici, dans un premier temps, d'analyser ces tentatives métaphysiques, religieuses et philosophiques de déploiement d'un au-delà de la mort, pour entreprendre ensuite de montrer qu'il est pourtant possible d'entretenir un rapport à la mort qui ne soit ni une manière de « s'y apprivoiser », comme le dit Montaigne, ni une manière de l'esquiver.
C'est en prenant appui sur l'analyse de l'être pour la mort que propose Heidegger qu'on tente alors de faire apparaître qu'il existe un autre discours sur la mort qui exige comme sa condition de possibilité une libre assomption de la finitude de l'existence humaine.
Une telle conception de la finitude, qui n'est plus adossée à l'infinitude d'un être hors la mort et hors temps du divin, reconduit l'être humain à sa facticité originaire, c'est-à-dire à son caractère proprement terrestre, temporel et corporel. Une telle pensée de la mortalité comme finitude constitutive de l'ouverture au monde est en même temps une pensée de la naissance comme capacité finie d'avoir un monde, le mourir étant ici la condition du naître et la mort celle de la vie.
Ce qui nous est alors révélé, c'est que c'est dans la joie et le rire que, paradoxalement, nous entretenons le rapport le plus authentique à notre propre mortalité.
Caractéristiques
Sommaire
Avertissement
Introduction. — La grandeur de la mort
Chapitre premier. — La culture et la mort
1. Le deuil, origine de la culture
2. L'invention eschatologique
3. Tragédie et mortalité
Chapitre II. — La métaphysique de la mort
1. L'immortalité platonicienne
2. La « relève » hégélienne de la mort
3. La métaphysique du devenir
Chapitre III. — Phénoménologie de l'être-mortel
1. Mort propre et mort de l'autre
2. La mort et le mourir
3. La mort et le possible
Chapitre IV. — Mortalité et finitude
1. Finitude et totalité
2. Finitude et natalité
3. La finitude originaire
Conclusion. — La mort, la parole et le rire
Autour de l'auteur
Françoise Dastur, philosophe, est auteur de plusieurs ouvrages sur la philosophie allemande, dont Heidegger et la question du temps, « Philosophies », 1990.