Résumé
Les jeunes en bande ont tout pour déplaire. Décrits comme agressifs, hostiles, violents, ils incarnent une dangerosité de proximité. C’est à travers leurs « affrontements », leurs « agressions gratuites », leurs « trafics », leurs défoulements émeutiers, leurs penchants sexistes ou homophobes, que les bandes alimentent l’actualité journalistique. La place qu’elles occupent dans les médias est indissociable des prédations qu’elles commettent ou qui leur sont imputées.
Au delà des faits-divers, cette réalité pose de nombreuses questions : qu’est-ce qu’une bande ? Comment se forment-elles ? Peut-on les mesurer ? Quelles évolutions ? Qui attirent-elles ? Pourquoi ? Comment fonctionnent-elles ? Quelles places y occupent les transgressions ou les comportements violents ? Que disent ces groupes des évolutions de notre société ? C’est à l’ensemble de ces questions qu’est dédié cet ouvrage qui est le fruit d’une longue recherche de terrain menée dans une « zone urbaine sensible » de la région parisienne.
L’auteur s’est attaché à comprendre ce phénomène à la fois ancien et en constante mutation. La société change, les bandes aussi. Il y a un demi-siècle, leur ampleur et leur durée de vie étaient limitées par le service militaire et, surtout, par le plein emploi. L’école ne conditionnait pas autant les destins sociaux et les territoires ouvriers n’étaient pas imprégnés par le « bizness ». Aujourd’hui, le public des bandes, essentiellement masculin, se construit principalement dans trois scènes sociales : la famille, l’école et la rue. Trois univers liés entre eux, analysés de l’intérieur, afin d’appréhender la « pertinence » des bandes pour ceux qui les forment, la recomposition des liens sociaux qu’elles imposent et leur poids dans le quotidien de ceux qui les côtoient.
Caractéristiques
Sommaire
Introduction
Appréhender l'écologie sociale et politique des bandes
Comprendre la formation des bandes : hypothèses, enquête et restitution
Chapitre premier. — Bande et ségrégations
Villiers-sur-Marne, cité des Hautes-Noues : un territoire ségrégé et une rue dérégulée
Organisation spatiale des sociabilités
Expérience scolaire et bandes de jeunes : démobilisation et indisciplines
Franchir le Rubicon
Chapitre II. — Relations familiales et formation des bandes
Ambiance familiale
Ruptures familiales et engagement dans les bandes
La bande : un produit familial ?
Chapitre III. — Contrôle parental, éducation et autorité
Taille des familles et bande de jeunes
La supervision parentale
Faire autorité, défaire l'autorité
S'informer et se mobiliser : les réactions parentales
Chapitre IV. — La dynamique des bandes
La cité des Hautes-Noues et ses niveaux de cohésion
Des filles dans les bandes ?
La dynamique relationnelle des bandes
Chapitre V. — Des bandes de blousons noirs aux noirs en blouson ?
Des blousons noirs aux jeunes de banlieue : les bandes rattrapées par l'immigration
Ethnographie des usages de l'ethnicité dans le microcosme des bandes
Chapitre VI. — La communication publique des bandes : territoire, conflictualité et virilité
Économies de l'agressivité
Les dimensions spatiales des embrouilles
Les dispositions pratiques et normatives des « embrouilles »
Les embrouilles avec la police
Bandes de jeunes, émeutes et politisations
Conclusion
Annexe méthodologique
Les conditions de l'enquête
Profil des enquêtés
Bibliographie
Autour de l'auteur
Docteur en sociologie, Marwan Mohammed est chargé de recherche au CNRS depuis 2009. Il a été enseignant à l’Université de Versailles – Saint-Quentin et coordonne actuellement un séminaire sur les déviances et les nouvelles formes de contrôle social et pénal dans son laboratoire, le centre Maurice Halbwachs (CNRS-ENS-EHESS). Il intervient également dans de nombreuses universités, auprès des acteurs publics, notamment les professionnels de l’intervention sociale et du monde judiciaire. Il a par ailleurs participé à l’écriture et à la réalisation du film-documentaire La tentation de l’émeute qui a été diffusé sur ARTE.