Résumé
Souvent rabattue sur des stéréotypes réducteurs, la protection animale constitue une cause militante des plus anciennes et complexes. Du début du XIXe siècle jusqu’à nos jours, de multiples entrepreneurs de morale s’indignent du traitement que les hommes réservent aux bêtes et se mobilisent afin de corriger la brutalité de leurs contemporains. D’abord préoccupée par la cruauté à l’égard du bétail, ce n’est qu’à l’issue de longues péripéties que la protection animale s’étend aux animaux de compagnie et, bien plus tardivement encore, aux espèces sauvages et à leurs milieux naturels.
En s’appuyant sur une comparaison franco-britannique, cet ouvrage retrace les inflexions successives à l’origine des multiples facettes qui caractérisent, aujourd’hui encore, la protection animale. Indissociables des évolutions de la philanthropie, bien antérieures à l’apparition des mots d’ordre de l’écologie, les mobilisations collectives en faveur du sort des animaux éclairent plusieurs processus cruciaux de notre histoire sociopolitique : évolution des sensibilités et des émotions socialement valorisées ; définition de la violence légitime ; constitution des normes visant à réformer les mœurs ; rivalité des élites se réclamant de diverses formes d’autorité ; influence des religions sur les engagements militants ; effets des discriminations de genre.
Caractéristiques
Sommaire
Introduction
Chapitre premier. — Une cause ancienne et complexe
Le modèle britannique et ses émules
Des engagements équivoques, évolutifs et cumulatifs
Chapitre II. — Noble douceur, vile cruauté
La sensibilité des hommes distingués
Proscrire les spectacles répugnants
Chapitre III. — Agir en philanthrope éclairé
Ni sentimentalité ni affectation
Du point de vue de l'intérêt bien entendu
Chapitre IV. — Éclairer l’ignorance, polir la barbarie
Une pédagogie de la douceur pour prévenir le crime
Surveiller, récompenser et punir
Des auxiliaires des pouvoirs publics
Chapitre V. — « Nous », les animaux et « Eux »
Les figures repoussantes de la bestialité
Des vertus nationales distinctives
Établis, challengers et exclus
Chapitre VI. — La montée en puissance de la tendresse
Animalité, égalité, fraternité
L’animal d’affection ou le refuge de l’intimité
Bestiaire imaginaire et peluches de l’enfance
Chapitre VII. — Victimes (animales) et domination sociale
Au fond de la révolte contre les forts
Démasquer les bourreaux, secourir les victimes
Émotions, contre-mobilisation, délégitimation
Chapitre VIII. — Une Nature de moins en moins « sauvage »
De l’exploitation à la contemplation des espèces
Férocité technologique, asservissements industriels
L’aggiornamento de la philosophie morale
Conclusion
Quelques repères chronologiques
Bibliographie
Autour de l'auteur
Christophe Traïni, membre de l’Institut universitaire de France, est maître de conférences à l’Institut d’études politiques d’Aix-en-Provence et médaille de bronze du CNRS 2005. Spécialiste des mobilisations collectives, il a déjà publié aux PUF Les braconniers de la République. Les conflits autour des représentations de la nature et la politique (2003) ; aux Presses de Science Po, La musique en colère (2008) et Émotions… mobilisation ! (2009).