Résumé
Les angoisses croissantes du XXe siècle devant le devenir de la nature et de ses locataires humains se sont rassemblées en un mouvement qui a récupéré le nom d’une science, l’écologie, avant d’en « corriger » le contenu. Espérant un soutien concret à leurs projets, voire une augmentation des budgets, les chercheurs n’ont opposé qu’une faible résistance à cet emballement. Trente ans plus tard, un constat consternant s’impose : l’écologie, née du darwinisme avec la mission de produire des synthèses, subit un étouffement, alors même que sa nécessité s’avère effectivement criante. Des principes moraux se substituent d’autorité aux règles de méthode, la vision pernicieuse d’une prétendue « place de l’homme dans la nature » bloque l’urgence vitale d’une écologie humaine complète, et une mosaïque de « sciences de l’environnement » confie l’exercice de la synthèse à un « bon sens » ivre de nostalgies.
Cet essai récapitule les conditions d’existence de l’écologie, montrant que, depuis sa naissance jusqu’aujourd’hui, elle a subi d’incessantes tentatives de kidnapping. Seule science de la vie à pouvoir aborder des faits sociaux, elle attire irrésistiblement le désir de fixer les lois de la société depuis la nature.
Caractéristiques
Sommaire
Introduction : L’ÉCOLOGIE, « SCIENCE DE PAILLE » ?
TABLE D’ORIENTATION
CHAPITRE 1 : EXTRAIT DE NAISSANCE D’UNE SCIENCE JEUNE
La genèse de l’écologie
L’écologie décousue : dilution historique contre précipité épistémologique ?
L’écologie kidnappée au berceau
Une méthode menacée par des lois
CHAPITRE 2 : UNE DISCIPLINE DE L’INTERDISCIPLINARITÉ
Une nouvelle carte des sciences de la vie (première moitié du XXe siècle)
Parois coulissantes et cloisons étanches : qu’est-ce qu’un « cadre de référence » ?
Le brasier théorique des années soixante
Reflux et affaissements : l’après-68
Le plan perdu et l’écologie humaine décousue
CHAPITRE 3 : ÉCOLOGUES ET ÉCOLOGISTES DANS LA HOULE DES SAVOIRS
La sociologie de la connaissance écologique : deux orientations
La science écologique dans la concurrence des savoirs
Le jeu écologiste des « sept familles » : cas concrets
Misanthropologie : hypothèses de travail
CHAPITRE 4 : L’ILLUSOIRE « PLACE DE L’HOMME DANS LA NATURE »
Contradictions, croisements et complémentarités
Biocénoses et sociétés
La prétendue « place de l’homme dans la nature »
Généralistes et spécialistes devant le crible oublié de l’événement
Conclusion : Une recherche exténuée par les prophéties
Autour de l'auteur
Docteur en biologie et en anthropologie, Georges Guille-Escuret est directeur de recherche au CNRS (Centre Norbert Elias, Marseille). Il a utilisé sa double formation pour préciser les conditions méthodologiques d’une coopération durable entre l’écologie et les sciences sociales. Il est l’auteur de huit livres, dont les trois volumes d’une récente Sociologie du cannibalisme (Puf, 2010-2013).