Résumé
« Le monde actuel, celui de la mondialisation et du capitalisme, est le monde juste qu’a voulu la philosophie depuis son commencement avec Socrate et Platon. » Comment l’auteur de cet ouvrage peut-il soutenir pareille thèse ?
Parce que le monde où nous vivons est celui de la fin de l’histoire. Non pas certes au sens hégélien d’un accomplissement naturel et irrésistible — il y a eu l’Holocauste. Mais au sens où, dans ce monde, le mal foncier de l’homme, sa complaisance inéliminable à l’aliénation, son injustice constitutive, son refus de l’« ex-istence » vers l’autre, sa pulsion de mort, ont été fixés : le mal a été réduit à sa forme minimale — socialement, le capitalisme. Dans cette fin de l’histoire s’établit la démocratie véritable, celle qui garantit à chacun, par le droit, les conditions pour advenir à son individualité. Une démocratie délivrée de tous démons de démocratie directe (populaire, d’opinion, participative, etc.) et confirmée dans sa vérité de démocratie représentative par l’acceptation résolue du capitalisme.
Telles sont les conséquences politiques que doit tirer aujourd’hui la philosophie, si du moins elle ne se contente pas, avec la pensée contemporaine depuis Kierkegaard, de poser l’existence ; de surcroît elle pose l’inconscient qui en est le principe. Car la seule affirmation de l’existence a voué la philosophie à une contradiction radicale incarnée dans ce penseur si problématique qu’est Carl Schmitt. Et elle a débouché, à travers le projet de révolution anticapitaliste, sur les horreurs du totalitarisme lumineusement décrites par Hannah Arendt. La philosophie ne peut résoudre une telle contradiction qu’en affirmant l’inconscient : cet inconscient créateur par lequel est assumé, autant qu’il est possible, le refus foncier de l’existence — la pulsion de mort.
Caractéristiques
Sommaire
Avant-propos
Introduction
Chapitre premier. — Acte et rupture
§ 1. Que l’idée de la rupture résulte de l’affirmation de l’existence et, a fortiori, de celle de l’inconscient
§ 2. Que ce avec quoi on rompt d’une véritable rupture est le système sacrificiel ou paganisme
§ 3. Que la rupture s’accomplit par l’acte politique qu’est la révolution
Chapitre II. — Acte et histoire
§ 1. Que l’idée de l’histoire résulte de l’affirmation de l’existence et, a fortiori, de celle de l’inconscient
§ 2. Que certes la pensée qui affirme l’existence commence par exclure toute position du savoir comme tel et donc, d’une manière ou d’une autre, par rejeter la philosophie et l’histoire — en quoi elle est rejointe par le discours psychanalytique. Et alors elle est vouée à se contredire
§ 3. Que toutefois la philosophique qui affirme l’existence peut, si elle envisage, de son point de vue à elle, le discours psychanalytique, et affirme, outre l’existence, l’inconscient, proclamer le savoir et l’histoire. Ce que nous proposons
Chapitre III. — L’histoire contre l’institution
§ 1. Que l’idée d’une histoire abolissant toute institution, et empêchant notamment, par la révolution, l’institution du capitalisme, s’impose d’abord
§ 2. Que certes, dirons-nous avec Marx, le capitalisme est le prolongement, dans le monde ouvert par l’exigence d’histoire, du système sacrificiel traditionnel
§ 3. Que cependant, dirons-nous contre Marx, vouloir abolir toute institution, et précisément vouloir empêcher, par la révolution, l’institution du capitalisme, ne peut mener qu’à la catastrophe
Chapitre IV. — L’histoire avec l’institution
§ 1. Que l’idée d’une histoire donnant toute sa place à l’institution, et ultimement à celle du capitalisme, s’impose alors
§ 2. Que certes, comme nous l’avons dit avec Marx, le capitalisme est le prolongement du système sacrificiel, mais, ajoutons maintenant au-delà de Marx, comme aliénation qui peut être dépassée, et cela dans le cadre du droit
§ 3. Que l’institution du capitalisme est donc bien ce sur quoi doit déboucher la vraie révolution, et ce qui marque la fin de l’histoire voulue par la philosophie
Chapitre V. — L’acte politique de la philosophie et le problème de son accomplissement
§ 1. Que l’idée de l’acte politique qu’elle doit accomplir elle-même est supposée d’emblée par la philosophie, dès son avènement en Grèce. Et qu’elle commence alors par vouloir accomplir cet acte contre la démocratie
§ 2. Que certes la philosophie doit bien vite reconnaître la radicalité du refus auquel elle se heurte. Qu’elle l’a fait, là aussi, dès la Grèce, et qu’elle a été conduite, à partir de là, à proclamer à nouveau la démocratie
§ 3. Que la philosophie ne peut accomplir son acte qu’aujourd’hui. Après que le Sacrifice du Christ a dénoncé la radicalité du refus que les hommes y opposent. Et qu’il a ouvert l’espace pour cet accomplissement, qui s’effectue peu à peu, dans l’histoire
Index
Bibliographie
Autour de l'auteur
Ancien élève de l’ENS de la rue d’Ulm, Alain Juranville enseigne la philosophie à l’Université de Rennes I. Il a publié aux PUF Lacan et la philosophie (1984), La philosophie comme savoir de l’existence, en 3 volumes : L’altérité, Le jeu, L’inconscient (2000), et L’événement. Nouveau traité théologico-politique (2007).