Résumé
La personnalité de Hölderlin, poète-fou, exige, par son caractère exceptionnel, de comprendre dans un seul mouvement son œuvre et son évolution vers et dans sa folie, ce mouvement fût-il scandé comme une dialectique et multilinéaire comme un contrepoint.
A plus d’un moment, la voie la plus directe de la psychose, de l’ÊTRE-PSYCHOTIQUE, se propose à Hölderlin : la question est fermée, bouclée dans cette boucle du rapport duel, et peut-être même peut-on se demander si cette solution ne vient pas remplacer une question qui n’aurait jamais existé, historiquement, pour le sujet.
Or le Poète rouvre, il ouvre la question.
Assurément c’est la question du père, dont il tente de rassembler les débris « chus d’un désastre obscur » : ce n’est pas là un phénomène inconnu dans la schizophrénie.
Il rouvre l’absence du père ? Oui, mais ce n’est pas pour désigner dans cette absence l’origine de ses maux ; c’est pour indiquer que seul ce « défaut » peut « l’aider ».
La poésie et le mythe hölderliniens tentent désespérément d’instaurer cette sorte de troisième pôle, comme chargé d’une énergie négative. Fonction bien précaire, mais qui maintient ouvert un certain temps ce qui chez la plupart des psychotiques s’est fermé en mode d’être.
Dans le cas de Hölderlin, la question : schizophrène parce que poète – poète parce que schizophrène ? perd son sens si elle peut en avoir un. Poète parce qu’il ouvre la schizophrénie comme question, il ouvre cette question parce qu’il est poète.
Caractéristiques
Autour de l'auteur
Jean Laplanche (1924-2012), ancien élève de l’École normale supérieure, ancien interne des hôpitaux psychiatriques et professeur à l’université Paris Diderot, a dirigé aux Puf les collections « Bibliothèque de psychanalyse » et « Voix nouvelles en psychanalyse », ainsi que l’édition des Œuvres complètes de Freud en français. Il est l’auteur d’une œuvre importante, qui compte notamment le Vocabulaire de la psychanalyse (avec J. B. Pontalis).