Résumé
Le lien entre Marx et politique semble évident. Qui peut ignorer qu’il lui a consacré sa vie et son œuvre ? Quel sens alors y a-t-il à parler de « Marx politique » si le nom de Marx contient d’emblée la dimension politique, mieux s’il n’a pas de sens hors de la politique ? Une question se pose pourtant : que faut-il entendre par « politique » quand il s’agit de la pensée de Marx ? Et là rien n’est plus aussi simple qu’il y paraît à première vue.
On observe d’abord qu’une certaine habitude a été prise qui n’en fait qu’un aspect ou une partie de l’œuvre. C’est par exemple le cas dans les éditions de ses œuvres ou dans la répartition disciplinaire des commentaires et des présentations. Mais faut-il continuer à croire, comme le suggérait Maximilien Rubel dans son édition de la Pléiade, que l’on peut aisément distribuer les textes marxiens entre l’économie, la philosophie et la politique ? Et si l’on considère le destin académique de Marx, devrait-on vraiment isoler un « Marx politique » du Marx des économistes, du Marx des philosophes, voire du Marx des sociologues ?
Nous proposons ici de considérer, sous des angles différents, une pensée entièrement politique, mais en un sens précis : que la « matière » qu’elle traite soit philosophique, économique, juridique ou sociologique, il n’y est jamais question que d’une seule chose, ou plutôt d’une seule cause : celle de la révolution en vue de l’émancipation humaine. Il convient alors de se demander comment cette finalité de l’émancipation par la révolution affecte chez Marx la conception même qu’il se fait de la politique, et en quoi cette conception peut nous concerner dans notre rapport à la politique aujourd’hui.
Caractéristiques
Sommaire
Marx politique
Éditorial, par Yves Charles Zarka,
I - DOSSIER : Marx politique
Pierre Dardot et Christian Laval, Présentation
Pierre Dardot, Marx en 1843. L’émancipation humaine et la question de la démocratie
Emmanuel Renault, Fin de la politique et émancipation du travail : quand le réalisme rejoint l’utopie
Nicolas Poirier, Politique et démocratie chez Marx
Christian Laval, Marx, entre socialisme scientifique et politique athée
Michèle Riot-Sarcey, Marx et l’expérience singulière de 1848
Gérard Bensussan, La « traduction » dans la théorie politique de Marx
Anselm Jappe, Révolution contre le travail ? La critique de la valeur et le dépassement du capitalisme
François Chesnais, La crise et le dépassement du capitalisme chez Marx
Stéphane Haber, Critique du capitalisme ou défense de la modernité ? Un dilemme de la pensée politique
II - VIE INTELLECTUELLE
La Grèce déshellénisée ? Comment notre regard sur l’Antiquité a radicalement changé depuis les années 1960
Denis Thouard, Ce qui a transformé la Grèce
André Laks, Le désenclavement de la Grèce : le triangle français
Pierre Judet de la Combe, Parcours non croisés : philologie critique et psychologie historique
Rafael FaracoBenthien, Une posture critique au sein des études grecques : le cas Jean Bollack
Perrine Simon-Nahum, P. Vidal-Naquet - J. Bollack : Réflexions autour de deux lectures de la tradition
III -VIE POLITIQUE
Christian Godin, La marche blanche, un nouveau fait de société
Danielle Tartakowsky, entretien avec Jacques de Saint-Victor, Manifester à droite
IV - RECENSIONS
John Dewey, Après le libéralisme ?, Ses impasses, son avenir, traduction Nathalie Ferron, présentation et notes par Guillaume Garreta, Paris, Flammarion, « Climats », 2014, par Christian Godin
Pierre Macherey, Proust, entre littérature et philosophie, Paris, Éditions Amsterdam, 2013, par Anne Deneys-Tunney
Bruno Pinchard, Marx à rebours, Paris, Éditions Kimé, 2014, par Luigi Francesco Clemente
Cahier de l’Herne Simone Weil, sous la direction d’Emmanuel Gabellieri et François L’Yvonnet, Paris, Éditions de l’Herne, 2014, par Marie-Anne Lescourret
Autour de l'auteur
Yves Charles Zarka, rédacteur en chef de la revue Cités, est philosophe, professeur à la Sorbonne, université Paris-Descartes, titulaire de la chaire de philosophie politique.