Les Puf sont partenaires des troisièmes Rencontres internationales géopolitiques de Trouville, organisées par Frédéric Encel les 19 et 20 mai prochain. Notamment auteur de Mon dictionnaire géopolitique (2017) et de Géopolitique du Printemps arabe (rééd. « Quadrige » 2018), passionné par sa discipline, Frédéric Encel a à cœur de permettre la rencontre entre les citoyens et la géopolitique. Il a accepté de répondre à nos questions et de nous présenter ces journées, leur programme et leurs invités.
Le thème de ces troisièmes Rencontres internationales de géopolitique est « Comprendre et prévenir les guerres de demain ». Est-ce là le but premier de la géopolitique ?
Grande question ! Je vous dirais qu’en tout cas, l’analyse géopolitique devrait servir aux diplomates et aux dirigeants politiques à prendre les décisions les plus sages possibles et, de préférence, dans le sens de la stabilité, de la conciliation, du maintien de la paix mais aussi, le cas échéant, de l’emploi de la force afin de protéger des populations civiles en grand péril. Hélas, on a souvent l’impression qu’en réalité, la géopolitique procède davantage d’une discipline frappée au coin du machiavélisme. Je suis de ceux parmi les géopolitologues qui considèrent que l’appréhension des réalités sur le terrain ne doit pas entraver les efforts pour limiter les souffrances. Autrement dit, fi de la fameuse realpolitik servant de cache-sexe à un cynisme débridé ; ce n’est pas parce qu’on ne peut intervenir partout qu’on ne doit intervenir nulle part ! J’ajoute qu’aux Rencontres internationales géopolitiques de Trouville, on ne reçoit pas de militants déguisés en géopolitologues, ni de repris de justice condamnés pour contrefaçon. L’honnêteté intellectuelle, la réflexion, l’ouverture d’esprit et la fraternité républicaine les caractérisent ! Du reste, ces Rencontres se tiennent à la maison du peuple, la Mairie, et l’entrée y est libre…
Qu’est-ce qui vous a poussé à mettre en place cet événement ouvert au public ? Cela signifie-t-il que la discipline – encore jeune, puisqu’Yves Lacoste en a été le pionnier en 1975 – a atteint une certaine maturité, et donc un nouveau public ?
Avant même d’entamer ma thèse de doctorat sous son égide, voilà un quart de siècle, mon maître en géopolitique m’incitait à partager les connaissances que j’allais acquérir, à les transmettre aux citoyens et non à les conserver dans des cercles fermés et jargonnants. Bien plus tard, en 2016, Yves Lacoste me faisait l’honneur de coécrire avec moi une Géopolitique de la nation France (Puf), ouvrage dans lequel, précisément, nous nous adressions au plus grand nombre et de façon très directe.
Vous savez, la géopolitique est devenue extrêmement populaire et, en même temps, beaucoup en font comme Monsieur Jourdain faisait de la prose ! Je pense que les professionnels de la géopolitique que nous sommes doivent à la fois éviter le galvaudage des termes, des outils d’analyse et des concepts, et vulgariser la discipline. Les citoyens veulent savoir comment marchent les affaires du monde, et se sentent concernés par telle crise diplomatique, économique ou militaire ; à nous de leur apporter non pas des réponses péremptoires et absconses, mais des observations étayées, pratiques, aptes à susciter une meilleure compréhension des grands enjeux.
Voilà pourquoi je compose pour chaque Rencontre géopolitique des tables rondes aux thématiques précises, composées d’intervenants très divers – universitaires, diplomates, militaires, anciens ministres, reporters, humanitaires, députés, etc. – et animées par des journalistes de métier. Point important : dans chacune des huit tables rondes intervient au moins une femme ; le vieux credo machiste selon lequel la géopolitique serait une discipline intéressant moins les femmes ou dans laquelle elles seraient moins compétentes doit être combattu. J’ajoute qu’il va de soi qu’à l’issue de chaque table ronde un temps d’échange est laissé au public pour les questions, remarques, débats, témoignages.
Et le public ne s’y trompe pas qui, ces deux dernières années, est venu nombreux et assidu ; l’an passé environ deux cents personnes de tous profils et origines ont assisté à tout ou partie de ces Rencontres, et on en attend davantage encore cette année.
Pourriez-vous nous présenter le déroulement de ces rencontres ainsi que leurs intervenants ?
Les samedi et dimanche 19-20 mai à l’Hôtel de Ville de Trouville-sur-Mer, se succéderont donc huit tables rondes fortes de trois à quatre intervenants chacune, de 9 h 30 à 17 h avec des pauses à 12 h 30. Ces Troisièmes Rencontres seront une fois de plus placées sous le haut patronage du ministre Jean-Yves Le Drian, et auront pour partenaires – outre les prestigieuses Presses universitaires de France grâce à Monique Labrune que je remercie – La Croix, Hérodote, L’Histoire, ainsi que Sciences-Po Paris, l’Institut français de géopolitique et la Paris School of Business.
La leçon inaugurale du samedi matin (9 h 30) sera assurée par le philosophe et éditorialiste Raphaël Enthoven, l’ancien premier ministre Manuel Valls ayant accepté de clore les travaux le dimanche après-midi (17 h). Quant aux panélistes et présidents de séance, vous les retrouverez sur l’affiche officielle et définitive le 28 avril, soit trois semaines avant l’ouverture des Rencontres. Un espace librairie/dédicaces est naturellement prévu à proximité immédiate de la salle du colloque – géré comme chaque année par La Petite Marchande de prose, la librairie trouvillaise – et la sécurité sera bien entendu assurée à l’entrée de la Mairie. Ceux qui seraient intéressés par les deux épisodes précédents peuvent en retrouver les contenus sur le site internet de la municipalité de Trouville.
J’en profite pour remercier le Maire de la cité, Christian Cardon, pour sa confiance renouvelée et pour la passion qu’il manifeste, lui qui ne rate rien de chacune des tables rondes de ces Rencontres géopolitiques !