Gilbert Durand

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Cet article provient de l’Encyclopédie philosophique universelle, III : les œuvres philosophiques, tome 2 (sous la dir. de Jean-François Mattéi), Paris, PUF, 1992. Savoyard de naissance, agrégé de philosophie (1947), élève de G. Bachelard et F. Alquié, engagé dans la Résistance, Gilbert Durand entre à l’Université de Grenoble où il occupe à partir de 1962 la chaire de sociologie et d’anthropologie culturelle. Cofondateur en 1966 du Centre de recherches sur l’imaginaire (d’abord à l’Université de Chambéry, puis à celle de Grenoble) dont l’influence est marquante sur un grand nombre de groupes de recherches en France et à l’étranger, il s’engage activement aux côtés de courants de réflexions spirituelles comme scientifiques à contre-courant des modes intellectuelles ; d’une part en animant les sessions de l’Université libre Saint-Jean de Jérusalem (fondée par Henry Corbin) et des Eranos Tagungen à Ascona (Suisse), marquées par l’empreinte de la pensée de C. G. Jung ; d’autre part en participant aux rencontres épistémologiques antipositivistes (Colloques de Cordoue en 1979, Colloque Unesco de Venise, etc.). Il est aussi cofondateur des Cahiers internationaux du symbolisme et des Cahiers de l’hermétisme. En frayant le chemin à un “ nouvel esprit anthropologique ”, il veut mettre fin à l’émiettement positiviste des sciences de l’homme et restaurer, dans le sillage de G. Bachelard, de M. Eliade et de H. Corbin, sur les plans épistémologique, symbolique et herméneutique, la plénitude d’un imaginaire transcendantal, dont il étudie les formes synchroniques à l’aide du “ structuralisme figuratif ” et les variations périodiques dans la culture dans le cadre d’une “ mythanalyse ”. Ses très nombreuses études cherchent aussi à éclairer le modèle interprétatif par rapport aux grandes traditions philosophico-religieuses, à l’appliquer aux œuvres de la littérature ou de la musique et à en dégager les présupposés et implications par rapport à l’épistémologie contemporaine. Les structures anthropologiques de l’imaginaire : introduction à l’archétypologie générale 1960 Cet ouvrage, dans la même lignée que les travaux plus formalistes de Dumézil et de Lévi-Strauss, expose une méthode structurale de description du sémantisme des images, symboles et mythes, selon qu’y domine une tendance à l’exclusion ou à l’intégration des éléments. Il en résulte une typologie de trois régimes syntaxiques de l’imaginaire (visuel ou verbal) : un régime schizomorphe qui produit des images “ héroïques ” où dominent les dualités antithétiques (Ténèbres-Lumières) et les actions conflictuelles (séparer-mêler, monter-descendre) ; un régime mystique, saturé d’images fusionnelles (la coupe, la demeure) et d’intentionnalités conciliatrices (confondre) ; enfin, un régime mixte, “ synthétique ” ou “ disséminatoire ” qui tend à insérer les matériaux symboliques (l’arbre, la roue) dans une dialectique cyclique (initiation, métamorphose). Ces grandes polarités des productions imaginaires prolongent d’ailleurs des dominantes comportementales (posturale, digestive et copulative) et préfigurent des régimes de penser logique (logiques de la non-contradiction, de l’analogie et de la causalité). Les formes symboliques archétypiques, confirmées par de nombreux travaux littéraires, psychologiques ou sociologiques, font de l’imagination une faculté de spatialisation a priori du sens (de “ fantastique transcendantale ”), au service d’une vocation métaphysique qui est de conjurer le temps et la mort. Science de l’homme et tradition : le nouvel esprit anthropologique 1975 Prenant acte d’une crise des sciences de l’homme, enfermées dans un positivisme objectivant qui leur a fait négliger la dimension des formes et motivations symboliques, dans un historicisme réducteur de la pluralité de l’humaine nature, l’ouvrage veut fonder la nécessité en anthropologie de substituer à l’explication une démarche compréhensive allant jusqu’à réhabiliter la valeur cognitive du mythe comme donateur d’intelligibilité et de la gnose hermétique en tant que non-séparation du sujet et de l’objet. Cette révolution épistémologique dans les sciences de l’homme, loin d’être un retour à l’irrationalisme ou au passéisme, correspond aux nouvelles catégories d’intelligibilité apparues dans les sciences de la nature, en rupture avec le rationalisme aristotélico-cartésien, par exemple la synchronicité a-causale (W. Pauli, C. G. Jung) ou l’unité psychophysique de la nature (Colloque de Cordoue). (J.-J. Wunenburger) u Les structures anthropologiques de l’imaginaire. Introduction à l’archétypologie générale, Paris, Bordas, 1960, rééd. Dunod, 1984 ; trad. en esp., it., port., roum. — Le décor mythique de “ La Chartreuse de Parme ”. Les structures figuratives du roman stendhalien, Paris, Corti, 1961. — L’imagination symbolique, Paris, puf, 1964 ; trad. en coréen, esp., it., jap., pol., port. — Les grands textes de la sociologie moderne, Paris, Bordas, 1969 ; trad. en port. — Science de l’homme et tradition : le nouvel esprit anthropologique, Paris, Tête de feuille, Sirac, 1975 ; 2e éd. Paris, Berg International, 1979. — On the Disfiguration of the Image of Man in the West, Cambridge, Golgonooza Press, 1977. — Figures mythiques et visages de l’œuvre. De la mythocritique à la mythanalyse, Paris, Berg International, 1979. — L’Ame tigrée, les pluriels de la psychè, Paris, Denoël, 1981. — Mito, simbolo e mitodologia, Lisbonne, Ed. Presença, 1982. — Mito e sociedade. A mitanalise e a sociologia das profundezas, Lisbonne, Ed. “ A regra di Jogo ”, 1983. — La foi du cordonnier, Paris, Denoël, 1984. — Beaux-Arts et archétype. La religion de l’art, Paris, puf, 1989. l La galaxie de l’imaginaire, dérive autour de l’œuvre de G. Durand, Paris, Berg International, 1980.
DURAND Gilbert, né en 1921